Jouons la collectif

LA LFP SOUTIENT LE BLEUET DE FRANCE – ÉPISODE 1/5

LA LFP SOUTIENT LE BLEUET DE FRANCE – ÉPISODE 1/5

Jouons la collectif
Publié le 02/11 à 10:00 - LFP

Partager

À l'occasion du 11 novembre, la LFP et les clubs de Ligue 1 Conforama et Domino's Ligue 2 s'associent au Bleuet de France. Focus sur la pratique du foot en marge de la Première Guerre mondiale. Épisode 1/5.

À quelques jours du 11 novembre, la LFP et les clubs professionnels s'associent au Bleuet de France pour venir en aide aux victimes de guerres et d'attentats. À l’occasion de la 13e journée de Ligue 1 Conforama et la 14e journée de Domino’s Ligue 2, en partenariat avec l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de Guerre (ONACVG), la LFP publie une série d’articles pour accompagner le travail de mémoire de l’association et mieux faire connaître le rôle du football dans ces événements historiques qui ont marqué la France. Premier épisode.

Paradoxalement, la Première Guerre mondiale a été un tremplin pour la pratique du football dans l'Hexagone. Par sa représentation dans l’imaginaire collectif d’abord, avec l'image d'Epinal induite par la trêve de Noël de 1914, elle se poursuit ensuite avec la démocratisation de sa pratique chez les soldats en permission, ce qui accéléra la création de structures sportives après guerre.

MATCH ENTRE LES DEUX CAMPS À NOËL

C'est une scène immortalisée dans le film Joyeux Noël, sorti en 2005. Les soldats des deux camps fraternisent à l’occasion de la trêve de Noël 1914. C'est d'abord la possibilité pour les belligérants de relever leurs morts laissés dans le no man's land. Puis, des contacts se nouent, on échange des denrées, on prête la discussion autour de photos familiales. Plus loin, une partie de football s'improvise. Ces scènes étonnantes se sont déroulées dans plusieurs endroits. L'existence de ce type de trêves, souvent cachées par les états-majors, sont attestées par des témoignages convergents relatant ces rencontres spontanées sur le sol gelé du champ de bataille. De fait, la presse britannique est la seule à en avoir fait l'écho dans ses colonnes, photos à l'appui, en janvier 1915.

La trêve de Noël 1914 sur le front belge (Ploegsteert) : Anglais et Allemands photographiés ensemble
© IWM (Q 11745)

Cette reconnaissance d'éclaircie sportive dans le tumulte des combats sanglants a été matérialisée par plusieurs monuments, 100 ans après. En décembre 2014, Michel Platini inaugure, à Ploegsteert, en Belgique, un monument rappelant que le football peut être vecteur de paix.

Quelques jours plus tard, un monument est également érigé à Liverpool. Un an après, c'est à Neuville-Saint-Vaast, dans le Pas-de-Calais, que François Hollande inaugure le Monument des fraternisations. Si les fraternisations restent des parenthèses très ponctuelles dans la Grande Guerre, il n'en demeure pas moins que le football reste un sport privilégié et prisé par les soldats.

Statue de la trêve de Noël, Andy Edwards, Liverpool, Royaume-Uni.

DES BALLONS ENVOYÉS PAR L’ÉTAT-MAJOR

En Angleterre, le football est déjà professionnel en 1914. Si le championnat anglais perdure pendant le conflit, quelques centaines de joueurs professionnels décident de s'engager dans l'Armée, et côtoient des soldats d'autres nations. La pratique du football apparaît rapidement comme un moyen de rompre la monotonie lors de la relève des soldats. C'est aussi un élément central dans certains camps de prisonniers allemands qui attendent impatiemment le dimanche pour en découdre.

En captivité, les soldats reproduisent les rivalités territoriales en organisant des rencontres qui opposent les Parisiens aux Provinciaux, les Normands aux Bretons... En parallèle, des campagnes sont menées par les associations sportives et les fédérations pour envoyer des ballons aux soldats. Il faut attendre l'été 1917 pour que l'État-Major français, sur ordre du ministère de la Guerre, envoie des ballons au front.

De fait, une vraie culture de guerre sportive s'installe. Les journaux publient des nouvelles des sportifs au front, Les Sportmen au feu pour l'Ouest-Éclair, Les nôtres sur le front pour L'Auto, La guerre et les sports pour le Sporting... Des rubriques entières sont ainsi consacrées aux actes de bravoure des sportifs. La rubrique nécrologique témoigne du sacrifice de plusieurs d'entre eux.

Le langage du football est également appliqué au champ lexical de la guerre. Ainsi, le journal L'Auto, l'ancêtre de L'Equipe, évoque l’exemple du soldat Pierre Chayriguès. Gardien du Red Star et de l'équipe de France, c'est le premier gardien français à quitter sa ligne de but pour anticiper les actions des attaquants adverses. Dès le mois d'août 1914, L'Auto fait un parallèle entre le poste de gardien de but de Chayriguès et la défense du territoire français : « Celui qui défendit si souvent les filets de l'Equipe de France dans des tournois internationaux, se devait d'être de ceux qui barrèrent aux Allemands la route de Verdun ! ».

Lucien Gamblin, autre joueur international du Red Star, reprend à son compte la métaphore filée entre la pratique du football et l'engagement dans la guerre. « Le 31 juillet 1914, je reçus ma convocation pour un match important. Impossible de déclarer forfait. Je partis, je commençais à jouer, non plus comme arrière, mais comme sergent. Partie très dure. Il y eut des prolongations. Le club dans lequel je jouais s'appelait le 76e Régiment d'Infanterie. Au début, il n'était plus question de balle mais de balles », disait-il dans le même journal en février 1938.

UNE PRÉSENCE CROISSANTE DU FOOTBALL PROFESSIONNEL

Tout au long de la Grande Guerre, l’aura du football s’accroît, tout comme celle du sport en général. Le départ des athlètes pour le front, relayé par une presse sportive qui fait l'analogie entre l'engagement sportif et la défense de la France, enracine le sport dans une légitimité sociale inédite. Pratiqué par les soldats, nombreux sont ceux désireux de fonder un club au retour dans leur foyer. En pleine guerre, en 1916, est créée la section football de La Berrichonne de Châteauroux.

Dans l’immédiate après-guerre, en 1919, la FFFA (devenue FFF) est créée. La même année, la section football des Girondins de Bordeaux, l'AS Saint-Etienne, le Stade olympique montpelliérain, le Cercle athlétique messin voient le jour, tout comme l'AS Docks du Centre à Tours, l'Athlétique Sedan-Torcy ou le Sporting Club du Crédit de l'Ouest à Angers.

Ils s'ajoutent aux clubs déjà existants avant guerre, comme Le Havre AC, le Red Star FC, l'Olympique de Marseille, le Stade Rennais UC, l'Amiens Athlétic Club, l'OGC Nice, le SC Bastia, l'AJ Auxerre, le RC Lens, l'EA Guingamp, l'AC Ajaccio, le Valenciennes FC ou encore le Stade Malherbe Caen, accroissant ainsi le paysage du football français.